jeudi 17 mai 2007

452 - Les affres de la condition humaine

Je suis un rebelle, un antisocial, un réfractaire, un révolté : je laisse des traces de doigts sur les carreaux propres, mets un demi-sucre dans mon chocolat, utilise du papier rose pour faire mes devoirs. Écorché vif, je pleure à tièdes larmes quand on me tire la langue, ris avec une haleine pas fraîche quand je torture des escargots en les saupoudrant de poivre.

Plus tard quand je serai grand, je me vengerai. Mon destin sera tragique, romantique, absolu. Je m'engagerai dans une voie anti-conventionnelle, héroïque et désespérée : la voie du Destin. C'est comme ça que je l'appellerai.

Et je boufferai des sucettes écoeurantes et des gros gâteaux bourratifs à m'en péter la panse, à m'en claquer les boyaux, à m'en "enchiasser" les tripes ! Et je tuerai les mouches toute la journée. Et je perdrai mon temps à faire des ronds de fumée avec un gros cigare. "La voie du Destin"...

Je suis une âme en peine, un enfant du Destin, un soleil éteint. Privé de dessert, j'erre au hasard le coeur à vif. Demain sera un autre jour. Mais déjà je serai mort en dedans de moi. Que m'a-t-on ôté de mon Destin, que je ne saurai jamais ? Charlotte aux fraise, baba au rhum, ou plus modestement banane, pomme, prune ? Allez savoir ! Je suis déjà mort, éteint, asséché.

"Privé de dessert !". Ces mots qui tuent. Trois mots intolérables... Moi qui n'ai vécu que pour mieux donner un sens au mot "dessert"... Un froid mortel gèle mon âme. Le tombeau s'ouvre devant moi. Il me faut y entrer sans mon dessert. Finir mon repas sans joie, me coucher avec un estomac frustré, moi l'affamé de sucre, poignardé dans le dos par l'injustice... Rimbaud, Baudelaire, Hugo, à moi !

Attendez-moi. De vos lointains exils, entendez-vous l'appel du désespéré aux culottes encore brèves ? Quand je serai grand mes amis, mes chers amis, je sortirai de la tombe de l'enfance et alors, alors je me ferai aviateur, croque-morts et même pourquoi pas, pâtissier !

PRECISION DE L'AUTEUR

A travers ce texte je tourne bien évidemment en dérision certains creux "rebelles" qui pour bien peu de choses usent de mots décidément trop grands pour eux...

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